©AfreePress-(Lomé, le 19 août 2023)- L’Union des forces de changement (UFC) de Gilchiste Olympio se porte bien. C’est du moins ce qui ressort du congrès statutaire de cette formation politique, tenu le 12 août 2023 à Lomé et dont les conclusions ont été partagées avec nous, par son 1er porte-parole, Isaac Tchiakpé. Qu’est-ce qui a été décidé au cours de ces retrouvailles qui interviennent 13 ans après les dernières ? Le parti Détia, qui est traversé ces dernières années, par de fortes luttes de positionnement, de leadership et des contestations, peut-il renaître de ses cendres du fait simplement de la tenue d’un congrès ? “Les Congressistes ont insisté sur l’impériosité de consolider l’institutionnalisation interne du parti qui découle des Statuts et du règlement intérieur votés lors du Congrès. Cette institutionnalisation consiste en un changement de nature de l’organisation du parti, qui passe d’un stade où les rapports personnels prévalent à un autre où les structures sont formalisées et où le fonctionnement du parti est régi par des procédures précises”, a répondu M. TCHIAKPE.
En décidant de l’organisation de ce congrès, la motivation de l’UFC, a indiqué l’interviewé est de devenir la première force politique au Togo dans quelques années et conquérir les leviers essentiels du pouvoir dans une dizaine d’années.
“Cela nous oblige donc à plus de professionnalisme et de labeur pour moderniser le parti et le transformer en un véritable parti qui pourra exercer le pouvoir d’État”, a-t-il indiqué.
Lisez plutôt.
Hara Kiri : Bonjour Monsieur Isaac Tchiakpe. Vous êtes élu, premier porte-parole au dernier congrès de l’UFC. Congrès organisé le 12 août 2023 à Lomé. Tout d’abord comment se porte l’UFC ?
Isaac TCHIAKPE : L’UFC se porte désormais bien. Le Congrès statutaire du 12 août 2023 a réuni la quasi-totalité des membres du parti ayant voix délibérative. Les congressistes ont travaillé, débattu et délibéré. Je rappelle que cette assise était une demande pressante des militants.
Il était temps que nous nous réunissions pour faire un retour des expériences du parti depuis le dernier congrès extraordinaire du 12 août 2010.
Hara Kiri : Quelles ont été les recommandations importantes issues de ce congrès ?
Isaac TCHIAKPE : Le Congrès National est l’organe suprême de l’U.F.C qui a le pouvoir d’engager le parti par ses décisions. Cet organe qui est au haut de notre pyramide institutionnelle définit la politique générale du parti, fixe le programme d’activités à court, moyen, long et termes. Il approuve, après débats, les rapports moral et financier du Bureau Directeur, adopte les Statuts du Parti, élit les membres du Bureau Directeur ainsi que le Président et les membres du comité des Sages.
En effet, au cours du congrès statutaire du 12 août 2023, les Congressistes ont adopté une motion spéciale de soutien à Monsieur Gilchrist OLYMPIO, et diverses autres résolutions, notamment une résolution relative à la reconduction de Monsieur Gilchrist OLYMPIO comme président national de l’UFC, une résolution relative à la révision des Statuts et du règlement intérieur, une résolution relative au renouvellement des organes du parti, une résolution relative à la mise en place d’un Bureau politique, une résolution relative à l’examen et à l’adoption des rapports moral et financier, une résolution relative à la ligne politique du parti, une résolution relative à la question de l’absence ou l’empêchement du président national et diverses recommandations (relative à l’unité du parti, à la consolidation des institutions du parti, aux prochaines échéances électorales, à la paix et à la sécurité).
Mais, en substance, les Congressistes ont insisté sur l’impériosité de consolider l’institutionnalisation interne du parti qui découle des Statuts et du règlement intérieur votés lors du Congrès. Cette institutionnalisation consiste en un changement de nature de l’organisation du parti, qui passe d’un stade où les rapports personnels prévalent à un autre où les structures sont formalisées et où le fonctionnement du parti est régi par des procédures précises.
Nous avons aussi tiré des leçons des tiraillements engendrés par la mésinterprétation d’une disposition statutaire, l’article 22 relatif entre autres aux prérogatives des vice-présidents en cas d’absence ou d’empêchement du président national.
Il faut dire que l’absence ou l’empêchement tel qu’indiqué à l’article 22 des Statuts du parti ne peut être compris comme une absence du territoire national, mais constitue bel et bien un fait juridique défini dans l’article 20 du Code des personnes et de la famille du Togo (2021), notamment :« l’absent est la personne dont le manque de nouvelles rend l’existence incertaine.
En conséquence, l’absence du Président de l’UFC du territoire national ne signifie nullement une absence au sens de l’article 20 du Code des personnes et de la famille et tel que le disposent les articles 21 et 22 des Statuts de notre parti.
Le président national, Dr Gilchrist Sylvanus OLYMPIO demeure le seul représentant légal de l’UFC et nul vice-président ne peut se prévaloir d’exercer tout ou partie de ses prérogatives.
Hara Kiri : L’absence notable de certains cadres et personnalités de l’UFC, a été relevée lors de ce congrès. Comment expliquez-vous la non-participation aux travaux de M. Eliott Ohin et son éjection du nouveau bureau directeur de votre parti ?
Isaac TCHIAKPE : Je n’ai pas connaissance des raisons pour lesquelles notre camarade n’a pas daigné venir au Congrès statutaire, mais il demeure un membre de l’UFC, voire éminent et, peut à ce titre conseiller et donner ses avis sur la bonne marche du parti dans le cadre institutionnel défini par le Congrès statutaire du 12 août 2023.
Hara Kiri : Croyez-vous que ce congrès marque la renaissance de l’UFC sur l’échiquier politique nationale?
Isaac TCHIAKPE : Je dirai oui en ajoutant que la motivation de notre parti est de long terme, c’est-à-dire devenir la première force politique au Togo dans quelques années et conquérir les leviers essentiels du pouvoir dans une dizaine d’années.
Cela nous oblige donc à plus de professionnalisme et de labeur pour moderniser le parti et le transformer en un véritable parti qui pourra exercer le pouvoir d’État.
Cet objectif nécessite d’abord une rénovation en profondeur du parti, conformément au souhait depuis exprimé par le président national dans le discours prononcé à l’ouverture du Congrès extraordinaire du 12 août 2010, notamment :« opérer une rénovation en profondeur et non de façade de l’UFC », une « véritable révolution culturelle au sein de l’UFC », de l’émergence, pour le transformer en un appareil de combat politique mieux organisé, mieux dirigé, mieux encadré, plus soucieux de sa base, plus dynamique et plus efficace sur la scène diplomatique internationale, et en meilleur ordre de bataille pour les prochains élections législatives et présidentielles. « Le mot d’ordre de cette révolution culturelle », donc son enjeu et son objectif, c’est « la culture de l’organisation », en d’autres termes « le sens de l’organisation ». C’est d’actualité et nous sert de balise.
Hara Kiri : La convocation de ce congrès a-t-elle respecté les textes de l’UFC étant entendu que votre président n’était sur le territoire national ?
Isaac TCHIAKPE : Absolument ! En accord avec le Président national, et conformément à l’article 19 des statuts du parti qui dispose clairement en son dernier alinéa que : « le Bureau Directeur convoque le Conseil national et le Congrès statutaire aux époques prévues », nous nous sommes réunis en congrès statutaire.
Le bureau du Congrès National a constaté que le quorum était atteint, notamment les 2/3 des membres ayant voix délibérative. Dès lors, le Congrès statutaire est régulièrement constitué et a valablement délibéré.
J’ajoute que des 15 membres du Bureau directeur, seule un camarade n’a pas approuvé l’organisation du Congrès. Nous avions entamé un long et laborieux processus de discussions pour aboutir à un consensus tel que le préconise, du reste, nos textes. En vain ! le bureau directeur en majorité, conformément aux dispositions statuaires, a décidé de la tenue du Congrès statutaire.
Hara Kiri : 13 ans après l’accord historique UFC-RPT. Que retenir ? Cet accord est-il toujours d’actualité ou a-t-il fait son temps ?
Isaac TCHIAKPE : J’affirme que l’esprit de l’accord du 26 mai 2010 est pérenne, à savoir, parvenir à un règlement politique des crises et des tensions par la voie des négociations. Les compromis que ces négociations génèrent favoriseront la démocratie consensuelle et son corollaire qui est l’alternance. Dans ce contexte, l’alternance ne sera pas perçue comme la revanche d’un parti sur un autre. Ce que nous visons, c’est de construire un vivre ensemble qui fonde en même temps notre pacte social et politique.
L’art politique tien tout entier dans la maitrise de cette balance : maintenir l’écart entre les extrêmes. En effet, la politique, c’est la pratique du compromis.
En outre, le compromis, c’est le courage. C’est ce charisme de conviction qui a incité notre président national, Dr Gilchrist Olympio et le président de la République, Faure Gnassingbé à signer cet accord historique qualifié par nombre d’observateurs de paix des braves.
Hara Kiri : Quel regard avez-vous sur les partis politiques de l’opposition au Togo ?
Isaac TCHIAKPE : Nous sommes les aînés de la scène politique togolaise qui est plurielle en projets, et en valeurs, donc astreints à une exemplarité qui est celle de la tolérance, mais aussi de la bienveillance à l’égard de ceux qui ne partagent pas nos opinions et choix. Nous discutons avec toutes les forces politiques qui respectent l’État de droit et les valeurs de la démocratie. Au sein du cadre permanent de concertation (CPC) issu de la Concertation nationale entre acteurs politiques (CNAP) où siègent celles et ceux qui ont vocation à connaitre et à débattre des questions d’intérêt national, nous entretenons des rapports civils et républicains avec tous les partis qui y sont représentés.
Hara Kiri : Quelle est aujourd’hui la ligne politique ou l’idéologie politique qui incarne votre parti ?
Isaac TCHIAKPE : Comme l’a affirmé François Hollande, l’avenir d’un parti, c’est sa clarté et sa cohérence et son unité. Mais pas une unité dans laquelle on rassemble tout le monde pour ne rien penser, pour ne rien dire.
Une unité où c’est l’ensemble qui sait où il va et où il saura être cohérent”. En effet, outre la question relative à l’interprétation de l’article 22 de nos statuts portant sur les fonctions des vice-présidents en cas d’absence ou d’empêchement du président national, nous avons aussi débattu sur la ligne politique de L’UFC et des lignes de conduite qu’elle induit. Puisque, selon nos statuts (article 17) le Congrès définit la politique générale du parti, nous avons adopté une résolution relative à la ligne politique du parti et le Congrès a demandé que le Bureau Directeur organise des sessions de formation des militants et des cadres pour les y entretenir.
Cette ligne politique prend son origine dans le projet des Pères de l’indépendance de notre pays, à savoir l’Ablodé. Nous avons admis que depuis la lutte pour les indépendances, notre pays a traversé des épreuves qui ont conduit à une polarisation de la vie politique avec, son corollaire, une radicalisation du débat et un escamotage de la discussion démocratique.
Donnant de la profondeur historique à notre engagement au service de la nation togolaise, l’UFC a signé un accord politique avec le parti au pouvoir, le 26 mai 2010, dont l’enjeu est d’aboutir à une alternance pacifique qui ne soit pas perçue comme la revanche des uns sur les autres.
C’est une orientation politique qui nous incline à des compromis en étant exigeant sur l’intérêt général, mais bienveillant à l’égard de ceux qui ne partagent pas nos opinions et choix.
Nous sommes un parti d’opposition constructive, une force de proposition et d’élaboration pour un Togo nouveau. Nous ne sommes plus dans la contestation systématique.
Dans le contexte du Togo, seule une approche négociée peut permettre l’alternance.
La ligne du parti, à savoir, obtenir le changement de façon pacifique et négociée, résulte de cette philosophie du dialogue et de la discussion démocratique.
Cette démarche ne nous fait pas perdre notre identité d’héritiers de l’ABLODE, au contraire, elle est la manifestation d’une maturité politique et d’une identité qui assument notre passé difficile, douloureux et qui vise à construire la nation comme instrument d’inclusion de toutes ses filles et ses fils dans le respect de nos différences et de nos divergences.
Hara Kiri : L’UFC serait-elle candidate aux prochaines élections législatives et si oui, fera-t-elle mieux que le score obtenu aux élections législatives de 2018?
Isaac TCHIAKPE : Absolument, car nous avons des députés à l’Assemblée nationale qui vont défendre leur bilan et solliciter à nouveau la confiance des électeurs de leurs circonscriptions. En outre, l’UFC ambitionne d’être la première force politique au parlement, n’oubliez pas la légitimité historique qui est la nôtre ainsi que l’ancrage national de l’UFC. Du reste, nous avons un vrai bilan à défendre.
Merci beaucoup
Propos recueillis par Olivier Adja